J'ai enfin lu La solution à 7 % et je l'ai trouvé très réussi !
1891. Suite à son mariage avec Mary Morstan, Watson voit moins Sherlock Holmes. Celui-ci semble succomber de plus en plus à son
addiction à la cocaïne. Sous l’emprise de la drogue, il évoque son pire ennemi :
le professeur Moriarty (ce qu’il ne fait jamais quand il a l’esprit clair). Peu de temps après, ce même Moriarty vient voir Watson pour lui révéler que Sherlock Holmes le harcèle et le menace. Il jure qu’il n’est qu’un simple professeur de mathématiques et prévient Watson qu’il risque de porter plainte contre Sherlock. Aidé par Mycroft, Watson décide de sauver Sherlock Holmes malgré lui et de lui faire rencontrer un médecin viennois qui a publié un article expliquant qu’il pouvait guérir les personnes atteintes d’une addiction en utilisant l’hypnose.
Il y a tout d’abord un
avant-propos, écrit par Nicholas Meyer lui-même, qui nous explique comment ce manuscrit inédit de Watson lui est parvenu entre les mains. Il dit qu’il l’a retouché pour la publication, ce qui explique que l’on ne reconnaisse pas le style habituel du docteur Watson.
Il y a ensuite des «
pages liminaires » où cette fois c’est Watson lui-même qui nous explique qu’il a rédigé ce manuscrit en 1939. Il dit qu’il avait promis qu’il ne révélerait pas cette histoire tant que les protagonistes seraient vivants, mais le dernier vient justement de mourir. Il nous précise aussi qu’il rédige cet ouvrage sans notes, ce qui peut expliquer qu’il diffère un peu de ses histoires habituelles. Enfin, il y il avoue qu’il a menti dans Le dernier problème et La maison vide pour dissimuler des événements bien trop graves pour être racontés à l’époque. Mais, il va enfin nous livrer la vérité.
J’ai beaucoup aimé
ces deux prologues car ils permettent à l’auteur de nous faire entrer dans son jeu. Il sait qu’il n’est pas Doyle et donc il nous informe qu’il va y avoir un changement de style. Il sait que son histoire va différer du canon et il nous prévient que deux nouvelles seront particulièrement touchées. À nous de savoir si on va le suivre ou pas. Pour ma part, j’ai apprécié cette façon originale de nous faire adhérer à ses théories.
Tout au long du livre, l’auteur
fait référence à de nombreuses nouvelles du canon et l’on croise des personnages des aventures passées comme par exemple Stamford, celui qui a présenté Watson à Holmes , ou bien encore le valeureux chien Toby qui joue une fois de plus un rôle important. Il y a aussi beaucoup d'humour.
Dans la première moitié du livre, les événements s’enchaînent à un
rythme effréné. On passe de Londres à Vienne. Le médecin qu’Holmes doit rencontrer n’est nul autre que Sigmund Freud ! Cet aspect est très réussi. L’auteur insiste sur les points communs entre les deux personnages en particulier au niveau des méthodes de déduction et de la capacité d’analyse. Freud lui présente une patiente muette qui a tenté de se suicider. Evidemment Holmes va réussir à déduire sa vie rien qu’en l’observant.
J’ai un peu moins apprécié
la deuxième partie parce que tout un peu « gros » (il y a une histoire de complot et une folle course poursuite en train). Même si j’ai un peu moins accroché à cause du manque de plausibilité de l’intrigue, le rythme reste haletant et les pages défilent rapidement. Cela ne m’a pas beaucoup dérangée car il faut dire que ce genre de mésaventure m’est aussi arrivé avec les écrits de Conan Doyle (par exemple au cours de la digression en Amérique pour Une étude en rouge).
Par contre,
la fin est très réussie car on nous apprend qui est Moriarty, quel est le lourd secret qu’il partage avec la famille Holmes et pourquoi Sherlock Holmes a commencé à se droguer.
A la fin de l’ouvrage, Holmes quitte Watson (ce qui sera le début de ses années perdues), pour aller jouer du violon, en lui disant de raconter qu’il a été assassiné par Moriarty, ce qui fait que l’on retombe sur nos pieds avec Le dernier problème.
Enfin, dans un
post-scriptum, Nicholas Meyer nous révèle les sources de ses théories (qui est Moriarty ? qu’est-il arrivé à Sherlock dans son enfance ? ) qui , loin d’être tombées du ciel, s’appuient sur des ouvrages de paralittérature holmésienne, ce que j’ai trouvé particulièrement intéressant.
On sent que Nicholas Meyer aime vraiment ses personnages et qu’il essaye de faire coller tout le canon ensemble (alors qu’on sait bien qu’il existe des contradictions dans ce qu’a écrit Conan Doyle).
J’ai lu, au sujet de l’auteur, un très intéressant article du New York Times
, qui explique qu’il a écrit ce livre en réaction aux Sherlock Holmes avec Basil Rathbone car ceux-ci ont donné une image trop policée du détective, mais aussi l’impression que Watson était un balourd (je ne les ai pas vus). Meyer voulait donc évoquer un Holmes imparfait, plus proche de la vision de Doyle et donner plus de crédit à Watson (qui explique par exemple que s’il apparaît un peu lent à suivre Holmes dans ses aventures, c’est parce que c’est le sentiment qu’il a face à un esprit aussi vif, mais cela ne veut pas dire qu’il soit bête).
L’article du NYT dit que Meyer a « réinventé » Sherlock Holmes ce qui a ouvert la voie à nos adaptations contemporaines avec un personnage beaucoup moins lisse. Je laisserai aux spécialistes le soin de trancher la question, mais j’ai trouvé cet article intéressant.
Le livre a été adapté en film sous le pitoyable titre français de
Sherlock Holmes attaque l’Orient Express (alors qu’on ne parle même pas de ce train dans le livre ; on parle certes de trains viennois mais tous ne sont pas ce train mythique). J’essaierai de le voir surtout qu’il a un casting assez incroyable (Laurence Olivier, Alan Arkin, Robert Duvall et Vanessa Redgrave).